quarta-feira, 23 de novembro de 2011

« J’ai peur d’avoir de nouveau faim quand le pain sera fini. »

Mère Teresa, fondatrice des Missionnaires de la charité, a reçu le prix Nobel de la paix en 1979 pour son oeuvre en faveur des exclus.


Inédit en France, c’est un florilège de méditations, de conseils, de lettres, d’enseignements, adressés par Mère Teresa aux membres de sa famille religieuse à travers le monde. Regroupés par Brian ­Kolodiejchuk, directeur du centre Mère-Teresa et postulateur de sa cause en canonisation, ces textes dessinent en creux le portrait d’une femme qui voulait se donner toujours mieux, toujours plus à Dieu à travers les pauvres. Quand l’amour est là, Dieu est là, à paraître le 24 novembre et dont nous publions des extraits en avant-­première, est un plaidoyer pour les exclus, un appel sans relâche à aimer. À travers les 450 pages de ce recueil, paru aux États-Unis en 2010 à l’occasion du centenaire de la naissance de la religieuse, la fondatrice des Missionnaires de la charité creuse, inépuisable, son sillon de pédagogue et de mère spirituelle. C’est bien du Christ « dans son déguisement désolant » dont nous parle la sainte, inlassablement. Si elle dépeint, d’anecdotes en souvenirs, le quotidien d’une vie de service immergée dans les misères les plus noires, c’est pour en extraire la moelle ­spirituelle : faire goûter la teneur du don ; inviter ses sœurs religieuses, surtout, à toujours aimer davantage, « jusqu’à en souffrir ».

Ces pages disent aussi son immense amour pour la famille, première cellule de la charité, mais qu’elle voit devenir, en Occident, le siège d’une pauvreté toute spirituelle. Face à un monde « assoiffé d’être aimé », elle appelle de manière lancinante à la proximité. Car le prochain, que son interpellation n’a de cesse de nous désigner, n’est pas seulement l’inconnu de la rue, mais aussi le familier ; le compagnon du quotidien.

Extraits :

« Le fruit du silence est la prière. Le fruit de la prière est la foi ; le fruit de la foi est l’amour. Le fruit de l’amour est le service. Le fruit du service est la paix. (page 21)

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Vous devez être emplies de silence, car, dans le silence du cœur, Dieu parle. Un cœur vide, Dieu le remplit. Même Dieu Tout-Puissant ne peut remplir un cœur plein – plein d’orgueil, d’amertume, de jalousie ; nous devons renoncer à ces sentiments. Tant que nous nous y accrochons, Dieu ne peut pas le remplir. Silence du cœur, pas seulement de la bouche – qui est aussi nécessaire – mais plus encore, ce silence de l’esprit, silence des yeux, silence du toucher. Alors vous pouvez L’entendre partout : dans le bruit d’une porte qui se ferme, dans la personne qui a besoin de vous, dans le chant des oiseaux, dans les fleurs, les animaux – ce silence qui est émerveillement et louange. (page 33)

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La faim n’est pas seulement ­l’absence de pain, c’est la faim d’amour, d’être aimé, d’être désiré. Cette terrible solitude des vieillards et des gens isolés est une faim terrible. La nudité n’est pas seulement l’absen­ce d’un morceau de tissu ; la nudité, c’est aussi ce manque de dignité, ce beau don de Dieu, la perte de la pureté du cœur, de l’esprit, du corps. Être sans logis, ce n’est pas seulement l’absence d’une maison faite de briques ; être sans logis, c’est aussi être rejeté, être un « rebut » de la société, indésirable, mal aimé, négligé. Là, au milieu de ces gens, vous pouvez mettre et je peux mettre mon amour de Dieu en actes vivants. (page 68)

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Nous avons tellement de gens comme cela, au cœur de New York, au cœur de Londres, dans ces grandes villes européennes, avec seulement un morceau de journal [comme couverture, ndlr], allongés là. Nos sœurs sortent le soir, de 22 heures à 1 heure du matin, dans les rues de Rome, et elles apportent des sandwiches, elles apportent quelque chose de chaud à boire. À Londres, j’ai vu des gens rester debout contre le mur de l’usine pour se réchauffer. Comment ? Pourquoi ? Où sommes-nous ? Donc, je crois qu’il est bon pour nous de ­commencer par aimer à la maison. Puis, une fois que nous aurons appris à aimer de cet amour qui fait souffrir, alors nous serons capables de donner cet amour, nos yeux s’ouvriront, nous verrons, nous verrons. Très souvent, nous regardons mais nous ne voyons pas ou bien nous voyons mais nous ne voulons pas regarder. (page 125)

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Pour moi, la plus grande injustice faite aux pauvres n’est pas tant que nous les avons privés de choses matérielles, mais que nous les avons privés de cette dignité d’enfant de Dieu, du respect que nous devons à une personne dont [nous] pensons « elle n’est bonne à rien, elle est paresseuse, elle est ceci, elle est cela » – tant d’adjectifs que nous rajoutons. Pour moi, c’est cela, la plus grande injustice […] et je leur dis toujours : « Que feriez-vous si vous étiez à leur place ? Si vous aviez l’estomac vide jour après jour et que vous voyiez vos enfants mourir de faim, de froid ? » (…) Il est facile pour nous qui avons l’estomac plein de proférer ce genre d’adjectifs. Et c’est la plus grande injustice. (page 130)

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Un jour, j’ai recueilli une petite enfant de six ans dans la rue. Et je voyais à son visage que cette enfant avait très, très faim. Alors je lui ai donné un morceau de pain et la petite a pris le pain et elle a commencé à le manger miette par miette ; alors j’ai dit à l’enfant : « Mange le pain, tu as faim, mange le pain. » Et elle m’a regardée et elle a dit : « J’ai peur d’avoir de nouveau faim quand le pain sera fini. » Alors, elle pensait qu’en le mangeant lentement, lentement, elle se sentirait moins affamée. La douleur de la faim est terrible et c’est là que vous et moi devons intervenir et donner jusqu’à en souffrir. Je ne veux pas que vous donniez comme ça, je veux que vous donniez jusqu’à en souffrir. Et ce don est amour de Dieu en actes. (page 223)

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Il y a beaucoup, beaucoup de gens (des vieux, des infirmes, des malades mentaux, des gens qui n’ont personne, aucun être pour les aimer) qui ont faim d’amour. Et peut-être que cette sorte de faim se trouve dans votre propre maison, votre propre famille. Peut-être qu’il y a une personne âgée dans votre famille, peut-être qu’il y a un malade dans votre famille. Avez-vous jamais pensé que vous pouviez montrer votre amour de Dieu en donnant peut-être un sourire, peut-être rien qu’un verre d’eau, peut-être rien qu’en restant assis là à parler un petit moment ? (page 224)

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Un monsieur hindou m’a un jour demandé, un fonctionnaire très important, haut placé : « Ne tenez-vous pas beaucoup à tous nous convertir ? » Et j’ai dit : « Naturellement, le trésor que j’ai, Jésus, naturellement que je veux le partager avec vous, mais la conversion doit venir de Lui. Mon rôle est de vous aider à faire des œuvres d’amour et alors, par ces œuvres d’amour, vous vous trouvez naturellement face à face avec Dieu et c’est entre vous que ce trésor, Son amour, s’échange. Et alors soit vous êtes converti, vous acceptez Dieu dans votre vie, soit non. » (page 288)

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Dans les bidonvilles, Jésus choisit comme déguisement la misère et la pauvreté de nos gens des bidonvilles. Vous ne pouvez pas respecter le vœu de charité si vous n’avez pas la foi nécessaire pour voir Jésus dans les gens avec lesquels nous entrons en contact. Autrement, notre travail n’est rien de plus que du travail social. (page 216)

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Vous devez faire de votre maison un centre d’amour brûlant, le soleil de l’amour de Dieu doit d’abord être dans votre maison. Vous devez être cette espérance de bonheur éternel pour votre mari, pour votre femme, pour votre enfant, pour votre grand-père, votre grand-mère, pour vos domestiques – tous ceux qui ont un lien avec vous. Vous travaillez dans une grande entreprise, vous êtes un coopérateur, mais vous ne connaissez même pas vos proches. Là-bas, vous devez être la flamme brûlante de l’amour de Dieu pour les gens qui travaillent avec vous ou qui travaillent pour vous. Est-ce qu’en levant les yeux, ils peuvent voir la joie d’aimer sur votre visage ? Est-ce qu’en levant les yeux, ils peuvent voir la joie d’un cœur pur ? Est-ce qu’en levant les yeux, ils peuvent voir Jésus en vous ? (page 364)

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Quand je dis joie, je ne veux pas parler de rires tonitruants ni de cris. Non, cela est trompeur, et peut être là pour cacher quelque chose. Je parle de la profonde joie intérieure qui est en vous, dans vos yeux, votre regard, votre visage, vos mouvements, vos gestes, votre vivacité etc. « Que Ma joie soit en vous », dit Jésus. Quelle est cette joie de Jésus ? C’est le résultat de Son union continuelle avec Dieu, tandis qu’Il faisait la volonté du Père. Vivre en présence de Dieu nous remplit de joie. Dieu est joie. Pour nous apporter de la joie, Jésus S’est fait homme. Marie est la première à avoir reçu Jésus : « Mon esprit exulte en Dieu mon Sauveur. » L’enfant dans le sein d’Élisabeth a tressailli de joie parce que Marie lui apportait Jésus. Ce même Jésus que nous recevons en Communion ; il n’y a aucune différence. (page 402) »

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